Les fournisseurs de l’Etat et des administrations seront progressivement d’ici 2020 dans l’obligation de facturer leurs clients publics via la plateforme Chorus Portail Pro (CPP). Cette obligation posée par l’ordonnance 2014-697 du 26 juin 2014 complétée par le décret 2016-1478 du 2 novembre 2016 concerne plus de un million de fournisseurs, à commencer par les plus importants dès janvier 2017.
Avant tout, nous voulons saluer l’excellent travail de l’AIFE qui a mis en œuvre Chorus Portail Pro dans un délai court tout en assurant une relation de qualité avec les opérateurs. Certes la documentation et les informations sont volumineuses… mais les outils et moyens mis en œuvre sont de haute qualité, à la hauteur des enjeux du déploiement à venir. Bravo.
Retour d’expérience 1 : les données, les données, les données !
Dans les flux dématérialisés il n’y a pas de facteur pour interpréter les adresses et deviner les informations manquantes. Les informations doivent être de qualité pour fiabiliser le routage des flux. En particulier dans le cadre de Chorus où on adresse via un point d’entrée unique toutes les administrations centrales, territoriales et hospitalières. Trois informations sont essentielles pour le bon routage des factures : le SIRET de l’administration, le code du service exécutant et le numéro d’engagement.
Les fournisseurs concernés par l’obligation de dématérialiser leurs factures ont donc un défi double à relever : insérer ces données dans leurs données de facturation et, surtout, disposer de ces informations ! En effet, ces informations n’ont souvent pas leur place dans le processus de facturation et, une fois qu’elles sont intégrées au modèle de données, on s’aperçoit qu’elle ne sont pas connues et qu’il faut aller à leur recherche auprès des clients publics concernés ; avec la difficulté que le code service est une nouvelle donnée. Plus le fournisseur facture d’entités publiques, plus le travail de collecte sera lourd. Cette collecte est sur le chemin critique du projet : elle est la source exclusive ET systématique des retards rencontrés.
Le premier conseil est de collecter dès maintenant ces informations et les intégrer sans tarder au modèle des données de facturation. Et bien sûr, veiller à leur maintenance dans le temps.
Retour d’expérience 2 : surveiller les premiers flux
Comme dans tout projet de dématérialisation de factures client les premiers flux doivent être sujets à une grande attention des équipes métier. L’objectif est de veiller à la continuité du flux de facturation et aux impacts éventuels sur la trésorerie en aval.
En effet, côté client « administratif » le changement est conséquent. Au point délicat du routage évoqué ci-dessus, qui peut égarer ou faire prendre un peu de retard à une facture du fait d’un code incorrect, s’ajoutent les impacts organisationnels liés à la disparition du papier. La disparation de repères traditionnels impacte le traitement en aval. Par exemple, dans le cas des flux dématérialisés sur Chorus en EDI fiscal, la disparition des particularités « visuelles » propres aux factures des fournisseurs, désormais toutes identiques par le jeu de la restitution en clair unique, perturbe de nombreux intervenants qui ne peuvent plus reconnaître au premier coup d’œil les factures de tel ou tel fournisseur ! Au passage, ce retour d’expérience peut inciter à opter pour le PDF (signé) hybride UBL, de préférence à l’EDI fiscal…
Le deuxième conseil est de suivre de près le traitement des premiers flux Chorus pour tenir compte en temps réel des retours d’information et mettre à jour rapidement toutes les données selon les besoins de correction identifiés.
Retour d’expérience 3 : ne pas prendre le risque d’une aventure en solo
Sans être complexe, la mise en œuvre des flux vers Chorus requiert des compétences, une disponibilité et des moyens techniques spécifiques. Certaines grandes entreprises mettent de gros moyens sur la table pour gérer ce projet en interne ou via une SSII car leur culture projet ou leurs habitudes leur impose de procéder ainsi. Cette démarche n’est pas une obligation : il ne vient à l’esprit de personne de lancer un projet pour envoyer un courrier par la poste.
Pour la plupart des fournisseurs ETI et PME il est préférable de s’appuyer sur un opérateur expérimenté. D’abord, car il est possible d’automatiser la dématérialisation vers CPP par d’autres voies que celle complexe de l’EDI fiscal : l’expertise de l’opérateur aidera à faire le choix adapté entre l’ensemble des modalités disponibles. Ensuite parce qu’un opérateur connecté à CPP dispose des connexions techniques, connaît le fonctionnement de Chorus et les jalons clé du processus de démarrage, maîtrise les environnements test-recette-production de Chorus : il sera un atout pour un rapide démarrage efficace à moindre coût en bénéficiant de son expérience.
En fait, quitte à mettre des moyens sur la table il est préférable de les mettre sur la collecte des données code service et numéro d’engagement (point 1). Pour filer la métaphore postale… personne ne fait un projet pour envoyer un courrier par la poste, mais toute entreprise a intérêt à bien gérer son fichier client pour limiter les plis non distribués et les « N’habite plus à l’adresse indiquée ».
Le troisième conseil est de s’appuyer sur un opérateur de facture électronique expérimenté sur Chorus, et quitte à mettre des moyens dans l’opération, autant les mettre sur la collecte des données obligatoires (Siret, code service et numéro d’engagement).
Retour d’expérience 4 : devancer l’appel et démarrer dès 2017
Les délais laissent le temps de se préparer progressivement. Malgré tout il est possible de devancer l’appel et démarrer avant l’échéance applicable selon la taille de l’entreprise.
Deux raisons justifient un démarrage avant l’échéance. D’une part le nombre de fournisseurs à déployer est tel que les vagues 3 (PME) et 4 (« le reste ») seront de déferlantes qui assécheront toutes les compétences disponibles tant côté prestataires que AIFE-Chorus. Surtout ces vagues risquent par leur ampleur de désarçonner les équipes comptables dans les administrations en bout de chaîne. Les démarrages non préparés se feront très probablement dans la douleur pour les fournisseurs trop attentistes. D’autre part, une fois le dispositif Chorus rodé (courant 2017) les démarrages se dérouleront dans les meilleures conditions et permettront aux fournisseurs qui anticiperont l’appel de gérer efficacement la bascule sur Chorus avec en bénéfice immédiat les retours d’information sur le traitement de leurs factures par leurs clients publics.
Le quatrième conseil est d’anticiper pour choisir la meilleure fenêtre de tir (de mi 2017 à courant 2018) afin de démarrer sereinement.
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