L’histoire commence quand l’importateur passe une commande à un fournisseur situé à l’autre bout du monde. Ce fournisseur procède ensuite à la livraison en une ou plusieurs fois, il établit une facture, puis une liste de colisage, une série de documents administratifs réclamés selon l’origine des produits ou leur nature, des instructions pour le transitaire ou le transporteur, des documents relatifs au crédit documentaire en place, des instructions à l’assureur.
Et ce n’est qu’échantillon de la chaîne documentaire fréquemment rencontrée. Encore aujourd’hui, le support principal de ces informations est le papier ou toute forme électronique qui lui est substituée (fax, document PDF, mail etc…). Mais la sécurité, la rapidité, la productivité additionnent leurs exigences pour pousser à la dématérialisation des échanges documentaires. Plus vite assurément… Mais aussi bien ?
Assurer la collecte et la diffusion des informations requises aux différents intervenants et aboutissants de la chaîne logistique internationale…. Chacun dans son coin y travaille. Mais le plus souvent sur une petite échelle. On constate très souvent des ruptures de l’information dans le cadre d’échanges intra-entreprises. La plupart des transitaires sont implantés aux quatre coins du monde. Et pourtant, très peu communiquent directement leurs informations de manière dématérialisée. Seuls les expressistes appliquent de telles méthodes car elles sont directement suscitées par l’urgence de leur prestation. On constate donc un lien direct entre l’obligation et la motivation.
Les gains d’échelles et les économies de budget
C’est ce qui a prévalu à la mise en œuvre par les administrations douanières sous la houlette de la Commission européenne, de systèmes de dédouanement dématérialisés supprimant complètement le support papier de la déclaration pour le remplacer par un « simple » message électronique élaboré au format XML ou Edifact. Ce n’était plus simplement des discours et des bouts d’essai mais cela devenait la réalité quotidienne. Apprendre à déclarer électroniquement avec DELTA n’a pas été une mince affaire et aujourd’hui encore, certains n’ont pas totalement appréhendé le processus en place ; ils le subissent plus qu’ils ne le maîtrisent.
Saluons cette percée à l’initiative des administrations. Dans le même cadre mais avec cette fois ci une dimension différente, le règlement ICS apparu en début 2011 a contraint les transporteurs internationaux à préaviser les administrations européennes des marchandises qu’ils prenaient en charge à bord de leurs moyens de transport à destination de l’UE. Cette obligation devant être satisfaite parfois avant le chargement du moyen de transport, la communication de l’information devait se faire d’un bout à l’autre de la planète pour pénétrer le territoire de l’UE. Il s’agit d’une étape décisive de confrontation des opérateurs à la transmission internationale de données dématérialisées validées par les administrations.
Et cela ne s’arrêtera pas là : déjà une nouvelle réglementation américaine va contraindre le monde du transport aérien et apporter de l’eau au moulin de la transmission électronique des données du commerce international et de sa logistique.
La pression de la rapidité et de la confidentialité
A bien y regarder, tout ceci ressemble à un vaste puzzle dont les morceaux ne s’emboîtent pas forcément les uns dans les autres. Il faudrait constituer un ensemble homogène et exhaustif des données nécessaires à une même opération. Ce serait la contribution progressive des différents intervenants de la chaîne dans un esprit de partage entre eux et les tiers qui peuvent en avoir l’usage.
La plupart des documents reprennent un ensemble commun de données sur des supports différents. La facture par exemple, revêtira une forme différente selon le fournisseur qui l’établira. Pourtant, ces mêmes données privées de tout support papier, peuvent être identifiées aisément au sein d’un message répondant à une syntaxe prédéfinie. Chacun peut disposer ainsi de la même information sans que celle-ci soit reproduite sur des supports disparates et parfois trompeurs.
L’accès aux données électroniques peut se faire moyennant un login/mot de passe qui définit le contenu accessible par les uns et les autres. Il convient de réglementer le droit d’accès aux informations : qui peut les visualiser, qui peut les récupérer pour son usage, qui peut les modifier en cours de vie. Ainsi, de la même façon qu’une marchandise se présente tantôt dans son carton d’emballage, tantôt sur une palette ou dans un conteneur, une donnée sera incluse dans un segment plus ou moins étendu suivant celui auquel elle sera communiquée.
Moins de ressaisies génère moins de sources d’erreur donc une plus grande fiabilité dans l’utilisation de la donnée. En effet, le contenu d’un document papier ou simplement scanné doit être saisi par un opérateur dans l’outil de traitement qui requiert cette information (l’outil douanier par exemple). Mais l’avantage principal de la dématérialisation est bien entendu la rapidité de communication de l’information d’un point à un autre du globe. Une rapidité qui permet d’anticiper.
Si vous êtes en possession des données de facturation, de colisage et de transport dès le départ des marchandises de l’étranger, vous pouvez automatiser le traitement de vos opérations douanières et anticiper la soumission de votre déclaration à Delta. Vous bénéficierez ainsi lors de l’arrivée, d’une libération plus rapide et donc d’une meilleure fluidité de vos approvisionnements. Et cette information n’est pas que douanière : une fois appréhendée par votre système informatique, elle va pouvoir alimenter également d’autres chaines de traitement. En cours d’acheminement, de la même façon, ces informations vont être utiles aux intervenants de la chaine logistique pour faciliter le déroulement des formalités de sortie du pays de départ, de réservation de fret, de chargement à bord, de mise en œuvre des règlements de sécurité etc…
Il serait cependant illusoire de croire que toute information est bonne à transmettre…. Que chacun peut formater celle-ci librement. Il faudra bien entendu respecter un minimum de normes, s’appuyer sur les standards définis par l’UN CEFACT et l’OMD. Mais aussi faire preuve avant tout d’un pragmatisme dont certaines normes sont parfois dénuées.
En conclusion…
Il ne peut s’agir de faire du point à point entre les différents acteurs, en raison de la multiplicité et la variété des systèmes en place. Il s’agit de constituer un chapeau universel permettant de relayer l’information entre les acteurs de la chaine internationale administrations comprises. Plutôt que d’acheminement des données, on pourrait parler de mise à disposition des données par les différents intervenants aux autres.
Il faudra un certain temps pour que cela devienne une réalité de la vie courante. Le phénomène contraignant de la réglementation viendra peut-être apporter un petit coup de pouce, mais l’aboutissement d’un tel processus dépend maintenant de la volonté individuelle des entreprises qui interviennent à tous les niveaux du commerce international et peuvent tirer profit d’une telle évolution.
Pour notre part, nous avons dès à présent inscrit un tel projet dans notre stratégie de développement. Il nous reste à convaincre les opérateurs des avantages d’une telle démarche pour l’optimisation de leurs flux logistiques internationaux.
Alban Gruson, PDG de Conex
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