Marc Delhaie, PDG d’Iron Mountain France et Suisse
La sauvegarde et le stockage des données est l’équivalent informatique du ménage de fin de journée. Chacun range bien proprement ses données avec la certitude qu’elles seront en sécurité et faciles à retrouver. Difficile d’imaginer qu’un tel sujet puisse porter à controverse. Et pourtant si, et à juste titre.
La solution adoptée par bien des organisations consiste en un plan de sauvegarde et de stockage des données centralisé, décliné en différentes options. C’est là que le débat devient houleux. Les plus véhéments sont les adeptes convaincus du Cloud, qui n’hésitent jamais à souligner qu’à un moment ou à un autre, toutes les sauvegardes sur disque dur se perdent, et que rien n’offre autant de capacité de stockage, de flexibilité et de facilité d’utilisation. À l’autre extrême, vous trouvez les prudents, plus méfiants vis-à-vis du Cloud. Ceux-là vous renverront aux faits sans cesse plus nombreux. La récente étude Symantec indique que 68 % d’entreprises se sont trouvées dans l’incapacité de récupérer les données stockées dans le Cloud, et Forrester recommande sans réserve aux entreprises d’effectuer des sauvegardes de toutes leurs données stockées sur le Cloud
Le monde de l’entreprise couvre une réalité complexe. Les départements IT doivent composer avec des budgets restreints et un empilement d’infrastructures informatiques et se laissent de plus en plus tenter par la sécurité et les avantages offerts par un fournisseur Cloud bien établi. Dans bien des cas, cela mène à un système hybride de stockage et de sauvegarde des données : serveurs sur site pour les informations les plus importantes et les plus confidentielles, et bandes et disques placés en lieu sûr, ainsi que le Cloud, pour les données moins importantes et moins utilisées. Résultat, les données sont bien rangées, bien protégées à peu de coût, et l’équipe IT peut se consacrer à des tâches plus stratégiques. C’est le cas, du moins, jusqu’à ce que les employés se mettent à réclamer les données auxquelles ils ne trouvent plus l’accès. Bien des équipes IT, prises par surprise, ne sont pas armées pour répondre à toutes ces demandes.
En début d’année, nous avons mené une série d’entretiens approfondis auprès de professionnels de l’informatique chevronnés en France, en Allemagne, en Hollande, en Espagne et au Royaume-Uni Il ressort de ces conversations que,dans certaines entreprises, les demandes de récupération des données peuvent augmenter de 60 % chaque année, de la part d’employés qui souhaitent retrouver des documents qu’ils ont accidentellement supprimés ou égarés, ou accéder à des données d’entreprise centralisées dont l’accès est contrôlé. La récupération des données peut être une expérience frustrante (surtout lorsque leur auteur se souvient à peine du sujet ou du contenu de celles-ci), longue et compliquée, jusqu’à exiger parfois l’intervention d’un expert extérieur.
Par exemple, dans les entreprises dont la compétitivité repose en grande partie sur des données, celles du secteur pharmaceutique par exemple, les employés ne sont pas autorisés à conserver la moindre donnée de l’entreprise sur leur PC : ils doivent formuler une demande officielle pour consulter ces données, auxquelles on ne leur accorde l’accès que pour une durée limitée et en lecture seule. Il peut en résulter un raz-de-marée quotidien de demandes d’accès.
Et toutes les demandes d’accès ne sont pas internes. Un nombre croissant de demandes sont formulées dans le cadre de l’eDiscovery à des fins légales, de conformité et d’application de la loi. Il est alors tout à fait impossible de ne pas retrouver et présenter les données requises dans les plus brefs délais.
Les entreprises doivent prendre en compte la facilité de récupération des données dans leur choix d’un plan de sauvegarde et de stockage. La meilleure solution est une approche hiérarchisée, depuis les informations contenues dans des dossiers fréquemment consultés, données clients ou dossiers médicaux, par exemple, jusqu’à celles qui ne seront probablement jamais utilisées ou presque, comme les polices d’assurance. Les premières peuvent être stockées sur des serveurs à portée de main, tandis que les dernières peuvent être clairement indexées et stockées à distance, éventuellement via un fournisseur extérieur, pour pouvoir être rapidement récupérées au besoin. Cette approche mixte optimisera les profits de l’entreprise tout en minimisant la charge pesant sur les ressources IT et les risques menaçant les données.
Le rangement des données et leur récupération peuvent sembler accessoires, comparés à toutes les choses palpitantes auxquelles vous servent ces informations quand vous les détenez; mais si vous négligez ces deux étapes, celle du milieu risque fort d’en pâtir. Sauvegarde, stockage et récupération revêtent une importance aussi cruciale que les données elles-mêmes.
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